Cachet en stéatite beige et rouille, au revers, l'inscription en négatif et en zhuanshu (Suo Bao Wei Xian). Chine, époque Qianlong (1736-1795). Photo Tessier & Sarrou.
Il est surmonte de neuf dragons loves les uns contre les autres et pourchassant la perle sacrée. (Eclats). Hauteur: 10 cm - Dimensions: 8,5 X 8,5 cm. Estimation sur demande
Référence: L'empreinte de ce cachet est mentionnée dans le livre Qing dai di hou xi yin pu (vol. 5, p. 16), qui a repertorié tous les cachets imperiaux de la dynastie Qing.
Provenance: Dans la famille d'un diplomate francais a Beijing, depuis le debut du XXe siecle. Dans plusieurs lettres adressées a sa «Bien chere maman», ce diplomate décrit dans le détail les réceptions à la Cour de Chine. Ces lettres en possession de l'actuel proprietaire, écrites des 1900, héritées de l'aieul qui a collecté le cachet, illustrent la proximité entre la Cour et les nombreuses légations étrangères en général, entre l'Imperatrice et les épouses des diplomates en particulier: «... L'Imperatrice et l'Empereur reçoivent régulièrement en audience»... «L'Imperatrice est présente à ces audiences et recoit quelquefois les dames en audiences plus intimes d'où le protocole est exclu. Il règne un peu plus de cordialité entre les étrangères et la suite de l'Imperatrice. Celle-ci leur fait visiter ses appartements privés et ses jardins...». En outre, les visites fréquentes semblent avoir instauré une certaine forme d'intimite ou même une certaine familiarité entre les deux parties et l'usage des cadeaux protocolaires était courant. En témoignent ces extraits: «... Puis toutes les dames se présentent de nouveau a l'Impératrice qui leur offre à chacune une bague et deux bracelets en or avec des pierres et des perles...»... «... Puis l'Imperatrice demande le jeune bébé de 2 ans, je me présente et m'excuse de ne l'avoir pas amenéà cause du froid; elle me remet pour lui un petit sac brodé avec deux médailles d'or d'assez grande valeur, puis un collier d'or chinois avec une plaque de jade en me disant que c'est un porte bonheur, et que c'est un grand honneur qu'elle fait lorsqu'elle l'offre...»
La culture du cachet en Chine est devenue florissante au cours des dynasties Ming et Qing. Parmi les douze empereurs de la dynastie Qing, l'empereur Qianlong (1736-1795) est celui qui possèda à la fois le plus grand nombre de cachets et les plus remarquables par la qualité. Plus de 1800 lui auraient appartenu, dont 700 ont disparu. Un millier d'entre eux sont conservés au Musée de la Cité Interdite. Les cachets sont de taille et de formes variables: carrés, ronds, rectangulaires, ovales...
Ce cachet carré de huit centimetres et demi de côté fait partie des plus grands. Les matériaux dont ils sont faits sont tout aussi divers: néphrite, bois, or, argent, bronze, pierres précieuses...
La stéatite dans laquelle celui-ci est travaillé provient de la province de Fujian; on la désigne par le nom de la ville près de laquelle elle est extraite: Shou shan. Cette variété de pierre est restée longtemps sous-estimée; néanmoins, depuis le milieu de la dynastie Ming, elle a été de plus en plus prisée par les lettrés pour la fabrication de leurs cachets, à tel point qu'à l'époque de l'empereur Qianlong, sous l'influence de la Cour, la stéatite de Shoushan est devenue une des pierres de cachets les plus précieuses, en particulier la variété Tian huang: cette stéatite de couleur jaune caramel a même été surnommée «l'empereur de pierre».
Le décor de ce cachet, neuf dragons parmi les nuages, est fortement symbolique: «9» est le plus grand des nombres impairs à un chiffre, qui représente le pouvoir masculin le plus puissant dans la nature; quant au dragon, il est le symbole de l'autorité impériale. Ce décor rappelle une peinture fameuse de la dynastie Song: il est typique du goût de l'empereur, qui aime que les objets de son époque réflètent des chefs -d'oeuvre anciens.
Aujourd'hui les cachets de l'empereur Qianlong demeurent une référence primordiale pour authentifier les peintures et les calligraphies impériales. Comme l'écrit l'historien japonais Sugimura Yuzo dans son livre L'empereur Qianlong: «Sous l'aspect culturel, la Chine du XVIIIe siècle est le pays le plus important du monde, la personne la plus importante de ce pays est l'empereur Qianlong. Il est né au début du siècle et mort à 89 ans en 1799. Pendant son règne de 60 ans, il a prouve ses nombreux mérites et obtenu des succès significatifs. La plupart des oeuvres d'art précieuses de l'histoire de l'art chinois ont un lien avec cet empereur.» Les inscriptions des cachets évoluent au fil des époques, y compris par la graphie. Les polices de caractères diffèrent: kaishu (ecriture reguliere), lishu (ecriture de chancellerie), caoshu (ecriture cursive)...
L'inscription en écriture zhuanshu de ce cachet, «Suo Bao Wei Xian», provient du Classique des documents, un recueil de documents politiques des souverains de l'Antiquite chinoise (environ troisième millénaire av. J.-C. - 627 av. J.-C.). C'est une forme abrégée d'une devise qui, dans sa forme intégrale, se traduit ainsi: «Si vous n'appreciez pas les objets precieux et considérez uniquement les hommes de talent comme les trésors de l'Etat, tout le monde se soumettra à vous». De nombreux empereurs chinois regardent cette devise comme un des principes politiques les plus importants. L'empereur Qianlong a commandé plusieurs cachets portant cette inscription, qu'il a utilisée sur des peintures et des calligraphies afin d'exprimer son respect des élites intellectuelles. Aujourd'hui, en regardant ce cachet «Suo Bao Wei Xian», nous pouvons ressentir à la fois l'esprit litteraire, le goût artistique et la pensée politique de ce grand empereur.
CHINA - QIANLONG Period (1736 - 1795) A fine nine dragon «shoushan» imperial seal. The seal face reading (Suo Bao Wei Xian). 3.93 x 3.34 x 3.34 in Estimate upon request
Tessier & Sarrou. ARTS D'ASIE. Lundi 16 juin à 14h00. Drouot Richelieu - Salle 15. EMail : mail@tessier-sarrou.com - Tél. : Tél. : 01 40 13 07 79 - Fax : 01 42 33 61 94